Les premiers soubresauts de l’intelligence économique en Afrique ont eut lieu au début des années 2000 : les Rencontres internationales de Tétouan marquent en décembre 2004 la décision, au plus haut niveau, de l’Etat de doter le Maroc d’une politique publique d’intelligence économique nationale et territoriale. Elles ont abouti à la création d’une Cellule d’analyse et de réflexion stratégique pour apporter l’instance d’orientation nécessaire au dispositif en construction, ainsi qu’un Observatoire d’étude et de recherche sur l’intelligence économique. Au Sénégal, le terme intelligence économique apparaît pour la première fois dans un décret de février 2005 portant création et fixant les règles d’organisation et de fonctionnement de l’Agence sénégalaise de Promotion des Exportations (ASEPEX) avec en son sein un pôle d’intelligence économique de l’Agence. En décembre 2006 en Algérie l’intelligence économique est à l’ordre du jour d’un conseil du gouvernement qui après l’avoir définie et reconnu la nécessité de sa pratique, invite les entreprises à la mettre en œuvre.
S’en suivent des conférences à l’instar de celle organisé par le Rotary Club doyen de Rabat en novembre 2007, sur le thème des pratiques d’influences dans les entreprises et des nouvelles techniques de guerre de l’information pratiquées dans le cadre de la guerre économique, les assises de l’Intelligence Economique et de la Veille Stratégique à Alger en mars 2007 ou du séminaire sur l’intelligence économique, en novembre 2008, à Dakar qui donnera naissance à l’Ecole Panafricaine d’Intelligence Economique et Stratégique (EPIES).
Les initiatives publiques, consulaires, privées ou associatives se multiplient alors dans différents pays : bien sûr au Maroc et au Sénégal, les deux pays les plus en pointe sur le sujet, mais aussi en Cote d’Ivoire, au Cameroun, en Algérie, au Bénin, au Congo, en Guinée, à Madagascar, en Tunisie, au Burkina Faso, au Tchad, etc. Des cabinets voient le jour dans plusieurs pays et mêmes des associations de praticiens, derrière l’Association Marocaine d’intelligence économique crée en 2006.
En 2016, Casablanca accueille les 1ères Assises Africaines de l’Intelligence Economique qui offrent l’opportunité à l’ensemble de la communauté africaine de l’intelligence économique de se rencontrer et de partager les différentes expériences nationales. Il en ressort la nécessité de produire des connaissances et de publier des informations de qualité en intelligence économique sur le continent qui donnera naissance au Portail Africain de l’Intelligence Economique qui permet à chacun de produire et diffuser des contenus sur le sujet.
En 2017, après la 2ème édition des Assises Africaines de l’Intelligence Economique, il ressort la volonté de construire un modèle d’intelligence économique africain, inspiré pour partie des expériences extérieures au contient, des initiatives africaines et en tenant compte des spécificités locales, notamment culturelles.
Et plus récemment en mai 2018, les participants de l’Université ouverte de Dakhla ont poursuivi cette réflexion en plaidant pour une vision africaine unifiée autour des pratiques de l’intelligence économique avec le lancement du Forum des associations africaines d’intelligence économique. Cette plateforme a pour objectif de diffuser auprès des entreprises, des administrations, des territoires, des universités et des centres de recherche la connaissance scientifique relative à l’intelligence économique et à la veille stratégique.
Il aura donc fallu un quinzaine d’année pour que se structure la démarche africaine d’intelligence économique avec quelques rares volontés publiques (Maroc, Sénégal, Algérie, Cote d’Ivoire) mais surtout des initiatives privées ou associatives. Les organisations multinationales africaines n’ont pour l’instant pas pris la mesure de la discipline pour améliorer leur productivité et optimiser leur processus de prise de décision. Mais il y a fort à parier que la multiplication des initiatives citées ici et le défi de production de connaissance qu’elles permettent de relever réveille les consciences sur le sujet.